Envie de te confier, envie de pleurer. Mais personne ne t’écoute. Chaque homme est une chose, chaque chose à sa place, et toi au milieu. La confiance en déroute. Une rose s’endort à l’ombre du soleil, et sa couleur de miel coule sans aucune cause. Le sang de Bastien fait un tour dans ses veines, puis repart aussitôt au rythme des battements de son cœur. Cœur qui bat ne s’arrête pas, mais le tien bat pourquoi ? Personne. Jamais. Personne jamais ne saura. Le froid qui est en toi, Bastien, le froid qui est le tien, recouvre le monde d’un manteau de ténèbres. La vie lui apparaît, à ce jeune homme seul, à travers le filtre qu’il nous impose et nous superpose, à nous qui ne sommes que des chiens, des moins que rien, comme un ennui mortel et une profonde tristesse.

Comment aimer la vie quand le destin nous a tout pris ? Quand notre naissance nous a placés dans une situation de misère si intense que rien ne nous appartient, nous sommes bien obligés de poursuivre notre chemin. Le noir espoir du soir se mue en désespoir, et tu écoutes le silence de la nuit illuminer ta vie. Quand tu auras compris que tu n’es pas d’ici, et que s’éveillera en toi la jalousie, pars. Fuis Bastien, fuis au loin et surtout ne te retourne pas. Sur rien. Oublie ton passé, ta haine et ta violence, laisse ton enfance sans rien demander en échange. Les anges ne se sont pas penchés au-dessus de ton berceau. Les divinités célestes ne veillent pas sur le temps qui te reste pour te le rendre profitable. Lamentable. Exécrable. Expérience qui se solde par un échec, ton existence est vide de sens. Car tu navigues dans le brouillard, sans personne à la barre, pour atteindre l’autre rive. Si tu y arrives, que trouveras-tu ?

Tu te fatigues inutilement, tu dépenses tes forces en vain Bastien. Tu recherches des liens qui ne sont pas humains. L’amitié, la constance, la loyauté et la présence, ne sont pas des cadeaux pour toi. Petit roi de pauvreté, fuir toujours plus loin, monter toujours plus haut, tel est ton destin entre poisson et oiseau. Tu t’envoles et puis retombes, tu creuses ta propre tombe. Derniers sursauts d’énergie avant le désespoir. Que faire dans un monde qui ne te comprend plus ? Pleure donc Bastien, laisse couler tes larmes, elles apaisent ton esprit et remplissent ton âme. Car la lave en éruption a toujours été durcie par la froideur de la mer.